Je n’ai plus aucune confiance dans le personnel hospitalier, car je sais qu’il ne m’écoutera pas, qu’il ne me soignera pas, qu’il pourra m’humilier lorsqu’il en aura l’occasion.

J’ai accouché en juillet 2015 à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre. Cet accouchement a été extrêmement difficile, et j’ai subi différentes maltraitances psychologiques à différentes étapes de ma grossesse et de la phase post-partum.

Depuis, je souffre d’un stress post-traumatique et je fonds en larme dès que je m’approche de l’hôpital. Je fais des crises d’angoisse dès que je dois me rendre à un rendez-vous, même si ce rendez-vous a lieu dans un autre service que celui d’obstétrique.

Avant l’accouchement (les dernières semaines de grossesse) :
Lors des dernières semaines de ma grossesse, j’ai développé une hernie discale qui n’a pas été diagnostiquée avant mon accouchement : j’avais pourtant signalé aux médecins et sage-femmes qui me suivaient que je souffrais de terribles douleurs à la jambe gauche. Mais à chaque fois que je leur parlais de ma jambe, on me répondait qu’il est « normal d’avoir des douleurs en fin de grossesse ».

C’est seulement au moment de la pause de la péridurale que le médecin anesthésiste a compris qu’il s’agissait d’une hernie discale, et que ma douleur provenait d’une sciatique. Son diagnostic a été confirmé par un scan quelques jours après mon accouchement. Résultat : la péridurale a été absorbée par ma jambe gauche, et j’ai eu l’effet d’une « jambe de bois » pendant plusieurs jours après l’accouchement. Ce qui m’empêchait de me déplacer, de prendre mon fils dans les bras (toute seule j’étais dans l’incapacité de me pencher sur le berceau et le prendre dans mes bras), et par conséquent de le nourrir correctement. Ce sont donc les puéricultrices qui ont donné le biberon à mon fils alors que je souhaitais l’allaiter.

Pendant l’accouchement :
Mon fils pesait 4,250kg à la naissance. L’accouchement fut difficile (« jambe de bois », épisiotomie, forceps). Une fois qu’il est né, il ne m’a pas été accordé de moment « peau à peau », pourtant décrit comme important dans les premières minutes de vie. Mon fils a été emporté dans une salle différente de la mienne, pendant environ 3h, avant même que je puisse le voir et le prendre dans mes bras. Aucune explication ne m’a été donnée concernant ce laps de temps durant lequel j’ai été éloigné de mon enfant : ce dernier allait bien, il ne nécessitait aucun soin particulier. Par contre, moi, je n’allais pas bien : on m’a laissé 3h dans une pièce froide, sans aucune explication. Lorsque j’ai demandé, en pleurs, à voir mon fils, une puéricultrice m’a dit que « j’avais bien le temps, j’avais 18 ans devant moi ».

Quelques jours après l’accouchement :
La cicatrice de l’épisiotomie me faisait extrêmement mal, au point de ne plus pouvoir marcher. Comme nous étions début août, je n’ai trouvé aucun médecin en ville qui était prêt à me recevoir. Avec mon conjoint, nous avons donc fini par retourner aux urgences obstétricales pour que je me fasse examiner. La cicatrice était en train de s’infecter. L’interne m’a fait une ordonnance pour un « bain de bétadine », en me conseillant de tremper mes fesses dans une bassine pleine de bétadine. Je l’ai fait pendant plusieurs jours : sans effet.

Quelques jours plus tard : la douleur était telle que je ne pouvais plus marcher, ni me lever. Nous sommes retournés une nouvelle fois aux urgences obstétricales : la cicatrice cette fois était grande ouverte. L’interne (différente de la première) me demande pourquoi je n’ai pas obtenu de « soins infirmiers » lors de mon passage aux urgences quelques jours auparavant. Je n’ai pas de réponse à lui donner : on m’avait prescrit un « bain de fesses » de bétadine. Il faudra attendre encore 10 jours pour que ma cicatrice finisse par guérir, grâce aux soins quotidiens d’un infirmier.

6 mois après l’accouchement :
Peu de temps après mon accouchement, au cours de l’allaitement, j’ai développé un kyste sébacé entre les deux seins. 6 mois plus tard, le kyste est surinfecté : après avoir consulté mon médecin traitant, je vais sur ses conseils aux services d’urgence générale du Kremlin-Bicêtre.

En apprenant que j’avais accouché il y a peu de temps, et au vu de la place du kyste (proche des seins), ces derniers m’envoient aux urgences obstétricales. Je suis reçue par une interne, qui ne cache pas son dégoût à la vue du kyste, et me dit que ce sont les urgences qui lui ont refilé le « sale boulot ».

Elle procède à une « mise à plat » du kyste, sans anesthésie, en me faisant des remarques très humiliantes : elle me dit que je n’aurais pas dû déranger les urgences pour si peu, que j’aurais pu « crever » le kyste par moi-même devant un miroir, exactement comme les « boutons que vous avez sur votre visage ». Je me sens honteuse, humiliée, je suis paralysée.

Je quitte une dernière fois le service des urgences obstétricales, en pleurs. Je me promets de ne jamais y remettre les pieds.

Depuis, le kyste (qui n’a donc jamais été retiré) est toujours là : il s’enflamme et s’infecte régulièrement.

5 ans plus tard, en 2021, je prends mon courage à deux mains et décide de consulter à nouveau quelqu’un. Le diagnostic tombe : le kyste est très inquiétant (il a beaucoup grossi), il est très profond. Pour le retirer j’aurai besoin d’une anesthésie générale. Je réalise aujourd’hui que si j’ai laissé passer autant de temps avant de consulter quelqu’un pour mon kyste, c’est parce que j’ai subi un stress post-traumatique après mon dernier passage aux urgences obstétricales : mon kyste (et donc mon corps) est perçu par le personnel soignant comme dégoutant, je ne veux plus qu’ils ne le voient.

Je n’ai plus aucune confiance dans le personnel hospitalier, car je sais qu’il ne m’écoutera pas, qu’il ne me soignera pas, voire même qu’il pourra m’humilier lorsqu’il en aura l’occasion.

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