En 2013 je suis tombée enceinte à un moment de ma vie qui était incertain. Pas d’emploi, pas de logement fixe et une relation amoureuse sans certitude.
Le père de l’enfant et moi hésitions encore sur la solution de l’IVG, pour des raisons purement « raisonnables », citées plus haut. Nous savions que si notre vie était plus stable, nous aurions écouté notre cœur et gardé l’enfant. Le temps de réfléchir et de prendre une énorme décision, nous avons fait les examens réglementaires, échographie, prises de sang, etc…
C’est lorsque nous sommes allés faire la première et seule échographie que j’ai subi mon « agression ». Nous avons été reçus par un monsieur qui semblait déjà énervé, désabusé.
Pendant qu’il me mettait le gel sur le ventre avec de grands gestes énervés au-dessus de moi pour faire descendre le produit dans la bouteille presque vide, il me posait des questions médicales jusqu’à celle-ci : « Et vous allez le garder ? ».
Nous avons répondu que nous ne savions pas encore et que nous étions en train d’y réfléchir. La réponse a été extrêmement déplacée et, par la suite, violente pour moi. « Ben je ne vois pas ce qu’on fait là et pourquoi je m’embête à vous faire cette écho alors ! »
Je suis quelqu’un de sanguin et j’allais lui répondre violemment quand mon compagnon m’a discrètement saisit la main fortement et fait un signe négatif de la tête.
Par la suite, nous avons décidé d’une IVG, au regard de notre situation de l’époque, qui s’est mal passée pour moi, longue, douloureuse et la vision, réelle, de mon fœtus qui s’échappait de moi dans la douche pour finir par disparaître dans la bonde. Cette expérience additionnée de cette phrase par ce monsieur me sont restées gravées en mémoire et me font mal.
Je regrette de ne pas avoir pu rembarré cet individu aussi vulgairement que possible et de me plaindre d’un jugement aussi violent sur ma personne.
J’ai été une enfant maltraitée par ses deux parents, attouchée par son père, travestie par sa mère, humiliée par les mots et les faits, puis abandonnée, familles d’accueil, foyer, pas de suivi psychologique, etc… Les mots sont violents pour moi, ils me restent à jamais en mémoire et me poursuivent depuis toujours. Aux phrases rabaissantes de ma mère, vient s’ajouter celle de cet échographiste et elle est tout aussi violente.
Aujourd’hui j’y pense moins avec douleur mais elle génère tout autant de colère.
Je remercie le reportage d’ARTE sur les violences obstétricales pour m’avoir donné l’envie de donner ce témoignage quelque part pour qu’il serve à quelque chose.
J’ai 30 ans et le chemin que la vie m’a fait prendre a fait de moi quelqu’un qui veut dénoncer les violences, quelles qu’elles soient.
Enfin, je remercie votre organisation pour être le « quelque part » où j’ai pu enfin livrer ce témoignage.